Les collectivités du bloc communal ont retrouvé leur pouvoir de taux sur la taxe d’habitation sur les résidences secondaires en 2023 après trois années de gel (gel de l’évolution du taux de la taxe d’habitation en 2020 puis gel du taux de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires en 2021 et 2022). Face aux difficultés auxquelles font face les collectivités (rigidité des charges, hausse des prix, perte de pouvoir d’achat, baisse des dotations de l’Etat), le levier fiscal constitue souvent l’une des seules options permettant aux communes et aux EPCI de faire face au financement de leurs compétences. Pour autant l’utilisation du levier fiscal est encadrée et a récemment évolué.
La suppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales a en effet contraint le législateur à modifier les règles de lien entre les taux inscrites dans le code général des impôts. Le taux de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) constitue désormais le taux pivot pour l’application de la règle de lien entre les taux, en remplacement du taux de la taxe d’habitation. Après avoir rappelé la nouvelle règle de lien qui s’applique entre les taux d’imposition, est exposé ci-dessous le cas particulier dans lequel se trouvent les EPCI ayant voté un taux de taxe sur le foncier bâti à 0 l’année précédente.
Rappel : quelles sont les nouvelles règles de lien entre les taux d’imposition ?
A partir de 2023, les communes et les EPCI ne peuvent pas augmenter leur taux de taxe sur le foncier non bâti et le taux de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires plus rapidement que le taux de la taxe sur le foncier bâti et, en cas de baisse du taux de la taxe sur le foncier bâti, ces collectivités se trouvent dans l’obligation de baisser leur taux de taxe sur le foncier non bâti, et leur taux de taxe d’habitation sur les résidences secondaires, au moins dans les mêmes proportions. Par ailleurs les EPCI à FPU ne peuvent pas augmenter leur taux de CFE plus rapidement :
- que le taux moyen pondéré de la taxe sur le foncier bâti de l’ensemble intercommunal (EPCI + communes) l’année précédente,
- ou que le taux moyen pondéré de l’ensemble intercommunal des deux taxes foncières si cette évolution est moins rapide que celle du taux moyen pondéré de la taxe sur le foncier bâti
Qu’en est-il de l’application de la règle de lien entre les taux lorsqu’un EPCI a voté un taux de foncier bâti à zéro l’année précédente ?
Nombreux sont les EPCI à FPU caractérisés par un taux de taxe sur le foncier bâti égal à 0 (ils étaient 134 dans ce cas). Il s’agit généralement d’EPCI ayant appliqué la TPU avant la réforme de la taxe professionnelle de 2010 (ou d’EPCI issus de fusions comprenant ce type d’EPCI). La question se posait de l’interprétation par la DGFIP de la règle d’encadrement de l’augmentation du taux de THRS dans ce cas de figure.
Le dispositif prévu par l’article 1386 B sexies est le suivant « Le taux de cotisation foncière des entreprises (uniquement pour les EPCI à fiscalité additionnelle et leurs communes membres) et le taux de taxe d’habitation sur les résidences secondaires et autres locaux meublés non affectés à l’habitation principale… ne peuvent, par rapport à l’année précédente, être augmentés dans une proportion supérieure à l’augmentation du taux de la taxe foncière sur les propriétés bâties ou, si elle est moins élevée, à celle du taux moyen des taxes foncières, pondéré par l’importance relative des bases de ces deux taxes pour l’année d’imposition. »
Une interprétation stricte de l’article 1636 B sexies aurait pu conduire à une impossibilité d’augmentation du taux de la THRS dans le cas où le taux de la taxe sur le foncier bâti était égal à 0 l’année précédente. En effet, aucune augmentation de peut être calculée, un rapport déterminé à partir d’un dénominateur égal à 0 débouchant sur l’infini. Cette interprétation aurait été contraire à l’esprit du législateur, alors même que la deuxième référence protectrice, à savoir l’augmentation du taux moyen pondéré des deux taxes foncières, peut quant à elle être calculée.
Suite à l’absence d’un recours préfectoral relatif à la délibération de l’un de nos EPCI clients, portant sur une augmentation du taux de la THRS dans la limite de l’évolution du taux moyen pondéré des deux taxes foncières, ceci alors que son taux de taxe sur le foncier bâti était fixé à 0 l’année précédente, il semblerait que la position de l’Etat respecte l’esprit du législateur.
Les EPCI dont le taux de taxe sur le foncier bâti était égal à 0 en N-1 ont donc, sauf modification de l’interprétation des services de l’Etat ou évolution législative, la possibilité d’augmenter leur taux de taxe d’habitation sur les résidences secondaires, dans la limite de l’augmentation du taux moyen pondéré des deux taxes foncières.
Quels enseignements tirer des décisions fiscales des EPCI en 2023 ?
Une note de la DGFIP d’août dernier, qui fait un recensement des décisions fiscales prises par les EPCI en 2023, montre une diversité de stratégies mises en œuvre relatives à l’évolution du taux de la THRS. Tout d’abord, l’augmentation du taux de la THRS n’est pas systématiquement exploitée puisque 178 EPCI seulement ont augmenté leur taux de THRS, alors qu’ils étaient 228 à avoir augmenté leur taux de taxe sur le foncier bâti. L’ampleur des augmentations de la THRS est par ailleurs très disparate : si 2/3 des EPCI ont décidé d’augmentations limitées à moins de 2 points, 5 d’entre eux ont décidé d’augmentations supérieures à 10 points.